Le Bodhisattva est celui ou celle qui reconnaît être fondamentalement un être d’éveil, et qui dédie sa vie à la réalisation de l’éveil au sein de l’existence. De cette reconnaissance naît un désir profond de partager cela avec tous les êtres.

Il formule quatre vœux qui sont la base de sa vie mais pour que ces vœux ne restent pas seulement des « bonnes intentions » ils sont accompagnés par ce qui est appelé traditionnellement les six paramita.

Il existe différentes traductions des paramita tel que, « perfections », « aller au-delà » ou encore « ce qui permet d’atteindre l’autre rive », mais la plus simple et peut-être la plus ajustée est tout simplement « les six pratiques ». Pratique, dans le sens de les cultiver dans le terreau qu’est le quotidien de son existence, alors vécues ainsi elles deviennent de véritables « passeurs » vers une vie de plus en plus éveillée.

Les six pratiques sont les axes que cultive le Bodhisattva dans le quotidien de l’existence. Mais elles ne sont pas réservées uniquement au Bodhisattva, elles peuvent aussi être un axe de vie pour toutes les personnes qui se sont engagées dans le cheminement spirituel.

Ces six pratiques sont orientées à la fois vers soi-même et pour le bien de tous les êtres.

Les six pratiques sont : le don ou la générosité, la conduite éthique, la concentration, l’énergie, la patience, la sagesse intuitive (prajna paramita).

Souvent, traditionnellement, elles sont présentées de la plus « facile » à réaliser à la plus subtile, ce qui pourrait induire qu’il y aurait un ordre hiérarchique, mais en fait toutes les paramita sont essentielles. Elles sont en complète interdépendance ; nous ne pouvons pas en pratiquer une et mettre les autres de côté, en attente. Quand nous en pratiquons une, nous pratiquons toutes les autres ; elles sont inséparables. Ainsi, en pratiquant les paramita, en les regardant comme existant chacune à part entière et en totale interdépendance les unes avec les autres, s’abandonne cet état d’esprit qui cherche toujours à séparer, à diviser, à créer des catégories.

Maître Deshimaru disait : « Les six paramita fondent les 10 000 pratiques de la vie quotidienne. Nous ne devons pas vivre selon des connaissances intellectuelles, mais par notre être tout entier, par notre corps et par notre esprit. »

Ceci est un point essentiel car la connaissance, la compréhension de soi, de la Voie qui est seulement acquise par le système mental, par le savoir, reste à la périphérie de l’être et n’atteint pas la profondeur, ne permet pas d’appréhender la totalité. Car le système mental ne connaît que les étiquettes au sujet de soi, des autres, au sujet de la voie, de la vie. La véritable compréhension est une compréhension intuitive qui ne vient pas de ce que nous saisissons avec le système mental, de ce que nous comprenons avec la conscience égocentrée, mais se réalise dans ce qui s’abandonne. Elle se réalise quand nous nous dépouillons des définitions, des croyances, des idées préconçues auxquelles nous sommes attachés, fixés.

Elle surgit à travers le corps dans la répétition consciente de la pratique méditative assise et de la pratique de la présence dans les différents moments qui tissent la toile de notre existence. C’est cette répétition en conscience (gyoji), avec un esprit frais, avec un esprit neuf, qui permet à la sagesse du coeur de se révéler.

S’exercer à pratiquer les paramitas permet donc d’entrer en profondeur dans toutes les actions de notre vie, de vivre chaque action dans la conscience, pas seulement dans un dojo, pas seulement pendant la méditation assise, mais dans tous les instants de notre vie. Ce qui permet de vivre la vie quotidienne comme une expression du cheminement spirituel.

Un sutra dit que le Bodhisattva, en empruntant le chemin des paramitas, marche avec les éveillés. Elles sont le véhicule qui nous met en marche sur le chemin de l’Eveil. C’est la pratique « méditative active ».